Le compte-rendu du conseil municipal du 21 mars 2024 par Jean-François Bridet

1, April 2024

Mon conseil municipal du 21 mars 2024. Une fois n’est pas coutume, ce conseil débute sous le signe du consensus : le marrainage par la ville de l’UISC-1 basé à Nogent le Rotrou (Sécurité civile) nécessite en effet un vote à l’unanimité.

Après que le maire a salué avec gourmandise la notoriété médiatique internationale de ce régiment (tout ce qui brille….), je m’adresse au colonel présent pour dire que le plus grand hommage que les élus locaux pouvaient rendre au dévouement de ses troupes était de mettre en oeuvre les politiques publiques permettant de freiner le dérèglement climatique à long terme et d’augmenter les mesures de prévention des risques courus par les populations à court terme. Il acquiesce en évoquant la nécessité de résilience que doivent développer les collectivités : le maire n’a pas pu contredire le militaire.

Autre sujet d’accord, même si le maire a tenté d’en faire un sujet polémique avec nous, les mesures conservatoires à prendre sur le site des jardins de l’évêché : à l’ordre du jour s’est en effet ajoutée la présentation par le directeur du patrimoine du résultat des investigations relatives aux conséquences de l’apparition du « fondis » il y a près de trois ans sur la partie inférieure des jardins.

Les recherches ont démontré la présence d’un tunnel sous la fondation du mur de soutènement bas. Les mesures et le diagnostic concluent au maintien de la stabilité du mur de soutènement haut, tandis que la paroi de soutènement basse continue à subir des déformations inquiétantes. En conclusion, des étaiements conservatoires sont prescrits pour stabiliser l’ensemble avant de mettre en oeuvre les travaux de confortement durable, quel que soit le projet ultérieur.

Puisque cette action permettrait la réouverture au public de la terrasse haute, nous nous positionnons pour affirmer notre soutien aux dépenses qui seront consacrées à cet étaiement qui doit être réalisé d’urgence et espérons qu’elles seront provisionnées dans le budget 2024 (aujourd’hui seulement 46 000 euros programmés dans les orientations budgétaires…).

Néanmoins, le cadre de la ville a bien confirmé que le BRGM avait autorisé le maintien de l’ouverture de la terrasse haute à condition d’une surveillance quotidienne des témoins sur les fissures de sol et de parapet. Cette mesure est immédiatement qualifiée de trop coûteuse par les élus de majorité ; pourtant, il aurait juste fallu former le personnel municipal qui était déjà mobilisé pour ouvrir et fermer quotidiennement les accès au site ! Bref, derrière ce sujet éminemment technique, encore de vrais choix politiques : consacrer notre argent à rouvrir ce lieu public, magique et gratuit au plus vite ou le précipiter dans un futur musée en sous-sol payant, nouveau « trou des halles », 50 ans après !

Le répit quasi-consensuel est de courte durée : l’épisode du label « Ville Jean-Moulin », déjà détaillé dans Cactus.press, met le feu aux poudres.

Nous montons en effet encore d’un cran, comme prévu, à l’issue de la présentation du rapport d’Orientations budgétaires par Franck Masselus. En effet le budget, la manière dont votre argent est dépensé, est bien le révélateur des politiques menées : on ne peut pas nous taxer de nous intéresser à des crottes de nez si nous en débattons…

Rien de nouveau dans les oppositions qui s’expriment sur les choix stratégiques : la majorité pour l’accélération des investissements pour les grands équipements porteurs d’attractivité, l’opposition constituée de Chartres Ecologie et de Chartres à Gauche défendant d’une seule voix sa préférence pour privilégier les investissements du quotidien au plus près des vrais besoins et dans les respect des défis du climat et de la biodiversité et préserver ou développer les budgets de fonctionnement relatifs aux services à la population avec la plus grande attention aux plus fragiles.

Nouveauté pour cet exercice, Ladislas Vergne se range également à notre avis et défend théâtralement son point de vue (« la fin d’une belle histoire », « une orientation budgétaire des années 2000 »), ce qui lui attire immédiatement les foudres du maire. Pour les attaques personnelles, mais pour un temps seulement, nous avons trouvé notre paratonnerre qui concentre alors les infâmies de Jean-Pierre Gorges :

“Vous m’avez léché les bottes pour être sur cette liste.” “On ne peut pas avoir fait l’ENA et sortir des énormités pareilles.” “Je peux vous montrer les messages où à l’époque on vous demandait de rentrer dans la liste pour la dynamiter ensuite de l’intérieur.” “Je me pose la question de vos convictions face à vos intérêts personnels.” “Et tout ce que la décence m’empêche d’écrire ici…” Voyant M. Vergne s’agiter (un peu) à l’écoute de ces attaques, le maire en fait des tonnes et menace de le faire expulser. M. Bonnet brandit ensuite le programme de campagne 2020 de la majorité pour souligner qu’il avait défendu alors le projet sous l’esplanade de la cathédrale. En vociférant hors micro, M. Cuzin ponctue les propos de son collègue par le qualificatif de TRAITRE, (ambiance…).

Quelques perles gorgiennes à nouveau remontées à la faveur de ce débat, auquel les élus macronistes ont refusé de participer malgré l’invitation du maire :

“La loi m’oblige à vous donner la parole mais vraiment, ça ne sert à rien.” “Celui qui fonctionne sans dette, c’est un débile.” “Vous n’aimez pas nos équipements, j’ai l’impression que vous n’aimez pas votre ville.” “Depuis la guerre et jusqu’en 2001 il n’y a eu aucun investissement à Chartres.” “La médiathèque, c’est très utile mais c’est de l’argent perdu.” “Le projet de musée sous l’esplanade de la cathédrale : à 100 000 entrées à 20 euros par an, il sera rentable sur 50 ans.” “Notre dette est tellement solide qu’on pourrait être en mesure de créer des « sub-primes »” “Je suis là depuis 23 ans : dans trois jours, je bats le record absolu !” “Vous savez, depuis 2001, je travaille ici tous les jours de 8 heures à minuit, et gratuitement encore ou quasiment, compte-tenu du temps que j’y passe !” (Pour information, une des annexes du rapport précise qu’au titre de son seul mandat municipal, M. Gorges a touché 78 000 euros bruts en 2023…)

M. Bonnet défend le taux d’endettement en s’appuyant sur le Code de la route : « Puisqu’il est recommandé de ne pas dépasser 12 ans de capacité de désendettement, on aurait tort de ne pas aller jusqu’à la limite : quand la vitesse autorisée est de 90 km/h, pourquoi rouler à 80 ? ». Je lui fais remarquer que ce qui compte avant tout, c’est la direction qu’on choisit d’emprunter !

L’un des derniers points de l’ordre du jour provoque enfin vers 23h30 un vrai débat de fond. Il s’agit de la création d’un parking souterrain de 250 places entre le lycée Marceau et le cours de l’Eure, à la place du pavillon de l’armée. J’affirme notre opposition à ce projet en pointant l’impact écologique des infrastructures souterraines sur l’hydrologie et le développement de solutions d’hier qui bloquent la ville pour quarante ans et plus. Je dis même que s’il y a une problématique avérée dans le quartier, il serait préférable d’aménager un stationnement de surface paysagé qui ne prendrait pas en otage notre ville et ses futur.es habitant.es. Cette position nous vaut une nouvelle diatribe anti-écologiste :

“Vos idées, je ne les aime pas et je sens que de plus en plus de Français ne vous aiment pas et tout ce que vous représentez me donne de l’urticaire.” “Je n’arriverai pas à vous convaincre et je déteste vos idées.” “Votre monde s’effondre : le bio coule, l’Allemagne recule sur la voiture électrique et Macron relance le nucléaire.” “Le centre-ville s’écroule car il n’y a plus d’habitants parce qu’ils ne peuvent pas garer leur voiture à côté de chez eux.” “Vous voulez inventer la ville de l’an 3000 mais les gens ne savent pas s’ils vont boucler la fin du mois.” Lorsque j’indique que si la ville dans 50 ans est toujours inféodée à la voiture individuelle, il faut craindre le pire pour nos conditions d’existence, le maire et sa première adjointe ont chacun et respectivement une réaction qui fait froid dans le dos :

“Votre avenir n’est pas le mien !” “Dans cinquante ans, je serai morte !” Après moi le déluge… : quel mépris pour les générations futures !

Mais ça n’est pas une surprise : en réunion à Orléans, au sujet de l’artificialisation des sols, J-P Gorges a osé dire que les objectifs 2050 lui importaient peu du haut de ses 70 ans !

Enfin, comment peut-on dire à l’un de ses semblables et concitoyens que l’on ne partage pas le même avenir ? Nous serons tous, collectivement, concernés, touchés, affectés, par les mêmes sécheresses, les mêmes canicules, les mêmes tempêtes et les mêmes pénuries. Nous devons tous affronter ces évènements et construire un futur vivable SOLIDAIREMENT.

Vers une heure du matin, la séance se prolonge à cause de notre vœu pour la réouverture du Rigeard après mise en sécurité, pré-études et installations provisoires (yourtes ?) afin que notre jeunesse retrouve un cadre naturel pour ses temps de détente et de découverte. Il nous est répondu qu’évidemment l’équipe municipale travaille à un projet ambitieux et d’envergure, on parle même d’y installer le défunt Muséum d’histoire naturelle, sauf que :

Aucun crédit n’est programmé de 2024 à 2026, Mme Dutartre nous vante les mérites du système alternatif d’accueil mis en place en urgence l’été dernier dans certaines écoles primaires. Puisqu’on nous bien dit que la politique se lisait dans un budget, tout cela ressemble donc bien à un enterrement de première classe.

Pour finir le maire nous rappelle avec gourmandise et fierté que c’est lui qui a ouvert le site aux enfants en 2003 ! Zut, encore un mensonge : c’est au début des années 1990, à la suite du Foyer d’accueil chartrain (FAC), que le site a commencé à être utilisé pour l’accueil de loisirs…

Il est déjà une heure et demie : au lit pour tenter d’y rêver un avenir commun et solidaire.